On a gagné
Déménagement calamiteux : condamnation intégrale
Un jugement rendu par le tribunal de Saint-Nazaire en matière de déménagement s’appuie sur plusieurs dispositions qui permettent au client consommateur de faire respecter ses intérêts.
L’histoire est celle d’un déménagement mal exécuté : seule une petite partie des meubles a été livrée à la date prévue. Le reste n’a été obtenu que six mois plus tard (avec dégradations), après intervention de l’association. La cliente n’avait pas payé le solde, en raison de ces anomalies.
Le contentieux se présentait alors ainsi : d’une part, il restait un solde de 1900 € à payer ; d’autre part, le remplacement de meubles manquants et la réparation de ceux abîmés étaient chiffrés par devis pour 3200 €.
Nous avons proposé à notre adhérente d’engager un procès pour obtenir la différence (environ 1300 €), majorée d’une indemnité pour privation d’usage pendant 6 mois.
Le Tribunal de Saint-Nazaire lui a donné intégralement raison, en reprenant chacun de nos arguments.
Il est intéressant de souligner les trois règles qui ont permis d’obtenir ce résultat :
- D’abord, la responsabilité du déménageur est absolue. Il ne peut invoquer que la force majeure, ou une faute du client (à condition d’en faire la preuve). Mais il ne peut pas se contenter de prétendre que « c’est arrivé après ». Le consommateur bénéficie de cette protection pour toute anomalie mentionnée à la livraison (et non contestée par le professionnel sur le même document). A défaut, il dispose d’un délai de 10 jours pour formuler ses réclamations par lettre recommandée (article L 224-63 du Code de la consommation). Le Code de commerce, que les professionnels invoquent systématiquement, n’est donc pas applicable.
- Ensuite, le montant de l’indemnité correspond aux justificatifs produits par le client (devis de réparation, facture de remplacement à neuf). La « valeur déclarée » dans le contrat, ou une clause des conditions générales ne peuvent limiter forfaitairement ce montant. En effet, selon les règles des clauses abusives, le contrat ne peut pas « réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement par le professionnel à ses obligations » (article R 212-1 6°).
- Enfin, les règles de la responsabilité contractuelles, selon les dispositions du Code civil (articles 1231-1 et suivants), sont également applicables en cas de préjudice complémentaire, distinct des dégradations ou pertes de meubles. C’était le cas ici, avec un retard de plus de 6 mois par rapport à la date prévue, pour que la cliente profite enfin de tout son mobilier, à sa nouvelle adresse.
Ainsi, le juge a procédé à la compensation des sommes dues (coût de remplacement et réparations) et à devoir (solde du prix), soit une condamnation de l’entreprise au paiement de 1296 €. Il a complété avec une indemnité de 500 € pour privation d’usage, ainsi que 300 € pour remboursement des frais de recours exposés.
Tribunal de Saint-Nazaire, 6 décembre 2019, N° 11 19-000359 l
Octobre 2020 | Hervé LE BORGNE |