La pratique de la provision pour charges locatives
Charges locatives : comprendre les règles
Dans une location d’habitation, surtout en immeuble collectif, le propriétaire réclame le versement mensuel, avec le loyer, d’un montant « provisionnel » destiné à couvrir les dépenses courantes d’entretien et consommations du locataire. Cette pratique n’est pas une obligation, et le bailleur ne peut l’imposer qu’en respectant de strictes obligations fixées par la loi du 6 juillet 1989 sur les rapports locatifs. Il existe deux conditions principales :
Or, on peut constater que la plupart des agences fixent une provision sans en justifier le montant, et que la régularisation annuelle des charges n’est pas systématiquement opérée. Régularisation des charges : connaître ses droits Selon la loi (article 23 § 3), le bailleur peut réclamer le remboursement des charges locatives acquittées par lui pour le compte du locataire, par provision mensuelle. Ce mode de recouvrement est donc licite en soi, mais il est conditionné par la loi : le bailleur doit justifier le montant de la provision, en produisant les comptes de l’exercice précédent, et le budget prévisionnel de la copropriété. Il ne faut pas confondre l’obligation de payer le loyer (qui est la contrainte principale pour le locataire, dont il ne peut s’exonérer que dans des conditions rares) avec l’obligation du paiement de la provision sur charges. Le paiement de la provision n’est pas une obligation essentielle, pour le locataire : c’est une modalité accessoire à son obligation de payer les charges locatives. Il s’agit d’une sorte de remboursement d’avance, fait au bailleur qui acquitte les appels de fonds du syndic. Mais cette modalité est strictement conditionnée : à défaut de respect de ces conditions par le bailleur, il n’y a pas d’obligation impérative à la charge du locataire. Ce raisonnement s’appuie sur le principe de droit des contrats contenu dans l’article 1217 du Code civil : si l’un des contractants ne respecte pas son obligation, l’autre est dispensé d’exécuter la sienne. La régularisation des charges locatives doit être faite au moins une fois par an. Le bailleur ou son agence présente un justificatif des dépenses réelles acquittées par lui. Le plus souvent, il s’agit d’un relevé individuel du syndic de copropriété, sur une page, avec en dernière colonne les montants récupérables. Le total des paiements du propriétaire (charges de l’immeuble et taxe d’ordures ménagères) et celui des provisions du locataire permettent de dégager un solde dû, soit au bailleur, soit au locataire. Si la régularisation n’a pas été faite avant l’année suivante, alors le locataire est en droit de régler le solde dû par douzième, sur simple demande (le montant dû sera réparti sur les douze prochains mois). De plus, au départ du locataire, le bailleur peut conserver jusqu’à 20 % du montant du dépôt de garantie, au titre d’une provision jusqu’au mois suivant l’arrêté annuel des comptes de l’immeuble.
Changer le rapport de forces Le locataire s’acquitte de son loyer, mais fait la « grève de la provision mensuelle » s’il n’a pas obtenu soit une justification de son montant par le budget prévisionnel de la copropriété, soit la régularisation annuelle de l’exercice précédent (soit les deux). Le locataire qui verse une provision sans justification peut contraindre le bailleur ou son agence mandataire à respecter la loi : au bout d’un an de location, il peut cesser de verser la provision (mais surtout, continuer à payer le loyer !). En cas de réclamation du propriétaire, il suffit de lui opposer ses obligations : tant qu’il n’aura pas justifié les dépenses réelles de l’année écoulée, et le montant de la provision pour l’année à venir, il sera hors-la-loi, et le locataire pourra valablement suspendre son versement « d’avance ». Cette position est juridiquement parfaitement défendable :
En cas de difficulté, l’association UFC-Que Choisir de NANTES peut vous renseigner. |
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Février 2017 |
par Hervé LE BORGNE |