UFC-Que Choisir de Nantes

Eau

Une bonne qualité de notre eau au robinet, à quel prix !

« Eau d’alimentation conforme aux limites de qualité et non conforme aux références de qualité » : c’est la synthèse des conclusions sanitaires qui apparaît fréquemment, ces derniers mois, sur le site du Ministère de la Santé, concernant les résultats des analyses des eaux destinées à la consommation humaine.

Plusieurs communes de Loire-Atlantique sont concernées, particulièrement celles reliées aux réseaux d’alimentation de Nort-sur-Erdre, Ancenis, Basse-Goulaine, Les Gâtineaux (à côté de Pornic)…

Les critères de qualité de l’eau potable distribuée sont issus de la Directive cadre européenne, transposée en droit français dans le Code de la santé publique. L’arrêté du 11 janvier 2007 fixe les normes de qualité à respecter pour un certain nombre de substances dans l’eau potable (pour les pesticides, le taux de présence doit être inférieur ou égal à 0.1µg/l par molécule et à 0.5µg/l pour le cumul des molécules).

Tout dépassement des normes qualité entraine pour le distributeur d’eau potable des mesures plus ou moins immédiates selon le risque sanitaire : fermeture de la source d’approvisionnement, dilution avec d’autres ressources moins contaminées, renforcement des traitements.

La lecture de ces relevés sanitaires n’est pas évidente pour le consommateur profane. Néanmoins, il apparaît que les raisons principales des anomalies sont liées très souvent dans notre département aux dépassements de la norme des molécules des pesticides. Des informations recueillies auprès de plusieurs intervenants dans le domaine de l’eau, la présence de métabolites de deux herbicides (métachlore et alachlore, utilisés pour le désherbage du maïs et du tournesol), est à l’origine de cette situation critique de la qualité de l’eau que nous consommons.

Pour ces produits phytosanitaires utilisés pour le désherbage agricole, présents dans les nappes phréatiques, les distributeurs sont amenés à renforcer le traitement au charbon actif, ou à modifier la filière de traitement de l’eau (investissement). Les coûts supplémentaires ne sont pas négligeables, puisque nous l’estimons à 2 millions d’euros par an sur notre département, montant qui se retrouvera sur notre facture d’eau, alors que nous ne sommes pour rien dans ces désherbages agricoles : nous sommes ainsi très loin du principe pollueur-payeur !

Nous déplorons à cet égard l’attitude des acteurs de ce domaine : en dehors du Syndicat départemental de distribution d’eau potable de Loire Atlantique (Atlantic Eau), les pouvoirs publics n’ont pas vraiment répondu à nos interrogations. Nous faisons l’amer constat d’une rétention d’information sous le prétexte de ne pas affoler la population…

On a aussi observé la pollution due à l’utilisation du métaldéhyde (phytosanitaire destiné à tuer les limaces et gastéropodes). Pour notre département, environ la moitié de la population a été concernée fin 2012 (et encore 100.000 habitants en 2015) par des dépassements de la limite de 0,1µg/l pour la qualité de l’eau potable. La situation s’est améliorée depuis 2012, avec une optimisation des traitements (adaptation des doses et du type de charbon actif) et donc augmentation des coûts de traitement, qui pèsent une nouvelle fois sur la facture d’eau des particuliers. Dans ce cas, le jardinier amateur a peut-être une petite responsabilité, mais pour arriver à une telle contamination, les pratiques agricoles sont plus largement en cause. Des solutions préventives et alternatives existent, comme l’utilisation d’un produit à base de phosphate ferrique, mais d’un coût plus élevé.

Ces deux exemples montrent bien qu’il y a véritablement des changements de pratiques agricoles à mettre en œuvre. Ces changements nécessaires sont affichés dans différents plans gouvernementaux, mais sans réel résultat, faute de volonté politique. Comme d’autres acteurs, l’UFC-Que Choisir s’efforce d’alerter l’opinion et les décideurs, sur les enjeux sanitaires et économiques de cette situation. Mais nous nous heurtons à l’hostilité des professions agricoles (« ce n’est pas votre problème ! »), comme à celles des autorités administratives (« chut, pas d’affolement : nous travaillons avec les agriculteurs sur le sujet… »).

Nos demandes demeurent :

  • Davantage de transparence sur les atteintes à la ressource en eau.
  • Application du principe pollueur-payeur.

De véritables actions des pouvoirs publics en s’appuyant sur tous les acteurs concernés.


Juillet 2016 par Gérard ALLARD